Photographe presse bouton !

Je disais en dessous "y a la photo prise et y a la photo faite". De manière générale, le photographe est le maître d'oeuvre de son image, comme le réalisateur d'un film. Il a une idée, il choisit son thème, la façon de la traiter, de l'éclairer, de la cadrer, de la retoucher, de la présenter. Chaque technique a ses difficultés : la bonne lumière pour le paysage, la bonne disposition des animaux en photo animalière, être à la bonne place au bon moment pour le reportage etc.

Dans la photo de modèles, et de plus en plus, la difficulté majeure rencontrée par le/la photographe est qu'il/elle n'est plus maître d'oeuvre mais un "presse-bouton" au service du modèle. Il a beau avoir une idée précise, des préférences, choisir le modèle avec qui il veut travailler ... il doit se confronter déjà à l'acceptation ou au refus du dit modèle d'autant que celui-ci pose maintenant très rarement "pour l'art" mais pour un objectif souvent intéressé, à savoir une rémunération le plus souvent.
Ensuite, le modèle a ses exigences et pose ses conditions, déjà pendant la pose, puis ensuite dans le choix et l'autorisation d'utilisation des photos : il n'est pas rare que le choix du photographe ne soit pas en concordance avec celui du modèle qui fait modifier une image voir la refuse, car soit elle ne se plaît pas dessus, soit gênée par des défauts qu'elle seule perçoit ou pour toute autre raison souvent personnelle (un photographe ne regarde généralement pas l'image comme peut la voir le modèle).
On ne parlera même pas des modèles dont la pose est une thérapie de leurs problèmes psychiques ou physiques.
A lire les exigences des modèles sur leurs fiches "casting", on est de plus en plus dubitatifs !! Elles présentent quelques photos à la webcam ou quelques photos d'amateurs - dans le sens péjoratif - et se croient déjà des stars de la "mod-bot" !

Certes, il est normal que le modèle se "protège" et qu'il n'accepte pas que son image soit utilisée n'importe où et n'importe comment, c'est logique, mais il doit y avoir un équilibre dans l'offre et la demande, et savoir si le modèle pose avant tout pour son intérêt propre ou celui du photographe.

Ceux qui rémunèrent (dans 99% des cas "au black") ne se posent pas vraiment la question puisqu'ils "achètent" un service et jouent sur ce point pour faire comprendre au modèle que si elle est payé elle n'a rien à dire. Il n'en est pas de même pour les photographes qui font cela comme une activité de loisir dont tout échange d'argent n'est pas à propos. Et les modèles en jouent car si elles ne sont pas payées, elles veulent autre chose en échange et comme le choix et vaste de bons photographes et bien ce sont ceux "au top" qui remportent le plus de succès (ou les plus argentés), les autres devant se contenter de ce qu'ils peuvent trouver et surtout accepter toutes les conditions du modèle et mettre de côté les leurs s'ils veulent avoir un espoir de réaliser leurs photos. En fait, de nos jours, c'est le modèle qui décide, il a même d'ailleurs TOUTES les lois pour lui ne serait-ce déjà pour l'exploitation de son image.

Pour ma part, c'est la raison principale pour laquelle j'arrête en grande partie la photo avec modèles car je n'ai plus envie de me mettre au service du modèle et ne plus avoir qu'à être un exécutant !! Je privilégie les échanges !! L'idée peut venir du photographe mais aussi du modèle (beaucoup de mes photos sont des mises en images de leurs idées), certes, mais chacun doit respecter le travail de l'autre avec des exigences adaptées à la démarche photographique et non pour des intérêts purement personnels. Si cela doit mettre un frein à la création ou si l'on doit sans cesse se poser la question "puis-je faire cette photo au risque que le modèle la refuse" où passer des heures de retouches pour que la photo parte à la poubelle, ou pire tout miser sur un ou des modèle pour se voir "utiliser" puis "dégager" ensuite, quel intérêt ? Aucun à mon avis.
La "photo passion" doit-être un plaisir, pas une prise de tête, aussi bien d'un côté comme de l'autre : si l'on rencontre plus de contraintes que de plaisir alors il vaut mieux changer de sujet : c'est pas ce qui manque en photo.